Les amérindiens appellent l'homme
Jaguar ZAWA-PINIM lorsqu'il est sous sa forme de Jaguar et CHIMBE
lorsqu'il est sous sa forme de Chauve-Souris Géante.
L'homme Jaguar est à la fois homme,
femme, jaguar et chauve-souris géante.
Le mythe de l'homme Jaguar raconte que
les peuples premiers d'Amazonie étaient mi-hommes, mi-femmes,
mi-dieux.
Ils se regroupaient en tribu autour de
leur forme animal : il y avait le clan des Anacondas, celui des
Tapirs, des Singes Hurleurs, etc... les hommes Jaguars étaient une
tribu très ancienne, très puissante et encore aujourd'hui très
populaire dans la culture amérindienne.
à écouter J.A.G. ( Jeunesse Autochtone de Guyane )
Si je devais rajouter des paroles à
cette photo et faire parler cette jeune fille, voilà ce qu’elle
dirait.
« Vous me regardez et me trouvez jolie … C’est assez drôle comme l’attention est portée sur nous dès que nous sortons nos perles, nos plumes, nos chants et nos danses. Mais cette attention, c’est tout au long de l’année que nous aimerions l’avoir … Quand nous buvons et mangeons du mercure, loin des caméras mais en famille.
Quand nous accédons plus que difficilement aux bancs des écoles, et que nous devons quitter nos familles, nos traditions et nos repères pour espérer atteindre un niveau scolaire acceptable.
Quand nos jeunes se suicident, désespérés par cette vie qui n’a pas l’air de vouloir leur promettre grand-chose.
Quand nous ne pouvons pas nous soigner faute de médecin. Nous sommes pourtant prêts à patienter 3 heures dans une salle d’attente, juste parce que nous n’avons pas pris rendez-vous … Mais la salle d’attente, est trop loin, sur le littoral.
Nous devons encore nous battre et défendre nos terres sacrées des convoitises de l’Homme. Les richesses de la Nature n’ont-elles pas plus d’importance que quelques pépites d’or ? C’est un combat et un débat de plusieurs siècles, je sais. Mais nous apprenons tous de nos erreurs passées.
J’exagère et me trompe, nous faisons les gros titres de certains journaux avec cette phrase si éloquente « Les Oubliés de la République » … Moi j’aurai plutôt écrit « Les Ignorés de la République »
Elle est là, la réalité de nos vies, derrières nos perles, nos plumes, nos chants et nos danses. Nous ne sommes pas qu’un folklore Guyanais, nous sommes la Guyane »
« Vous me regardez et me trouvez jolie … C’est assez drôle comme l’attention est portée sur nous dès que nous sortons nos perles, nos plumes, nos chants et nos danses. Mais cette attention, c’est tout au long de l’année que nous aimerions l’avoir … Quand nous buvons et mangeons du mercure, loin des caméras mais en famille.
Quand nous accédons plus que difficilement aux bancs des écoles, et que nous devons quitter nos familles, nos traditions et nos repères pour espérer atteindre un niveau scolaire acceptable.
Quand nos jeunes se suicident, désespérés par cette vie qui n’a pas l’air de vouloir leur promettre grand-chose.
Quand nous ne pouvons pas nous soigner faute de médecin. Nous sommes pourtant prêts à patienter 3 heures dans une salle d’attente, juste parce que nous n’avons pas pris rendez-vous … Mais la salle d’attente, est trop loin, sur le littoral.
Nous devons encore nous battre et défendre nos terres sacrées des convoitises de l’Homme. Les richesses de la Nature n’ont-elles pas plus d’importance que quelques pépites d’or ? C’est un combat et un débat de plusieurs siècles, je sais. Mais nous apprenons tous de nos erreurs passées.
J’exagère et me trompe, nous faisons les gros titres de certains journaux avec cette phrase si éloquente « Les Oubliés de la République » … Moi j’aurai plutôt écrit « Les Ignorés de la République »
Elle est là, la réalité de nos vies, derrières nos perles, nos plumes, nos chants et nos danses. Nous ne sommes pas qu’un folklore Guyanais, nous sommes la Guyane »
Marcher à travers l'Amazonie et
interroger les grands-mères et les grands-pères sur les femmes
jaguar, ils m'ont souvent raconté des histoires de femmes anciennes,
de femmes ayant le pouvoir de guérir, d'ordonner le monde, de se
rapporter à la nature, de connaître les mystères de l'univers .
Il y a quelques histoires par Orellana (l'un des premiers Européens à traverser l'Amazone) sur certaines femmes guerrières que lui et son peuple appelaient les Amazones. Ces histoires ont été prises comme mythe, exagération ou fantaisie. Pour moi, ces femmes qu'Orellana a vues étaient des femmes de Yuruparí, des femmes avec une grande force et capacité, des femmes tigres.
De la vision du monde des peuples autochtones, le pouvoir est lié à certains cycles que nous traversons.
Il y a quelques histoires par Orellana (l'un des premiers Européens à traverser l'Amazone) sur certaines femmes guerrières que lui et son peuple appelaient les Amazones. Ces histoires ont été prises comme mythe, exagération ou fantaisie. Pour moi, ces femmes qu'Orellana a vues étaient des femmes de Yuruparí, des femmes avec une grande force et capacité, des femmes tigres.
De la vision du monde des peuples autochtones, le pouvoir est lié à certains cycles que nous traversons.
Ce cycle que nous vivons actuellement,
pour de nombreux peuples, marque à nouveau le passage de cette
énergie du pouvoir masculin au pouvoir féminin, qui permet à
l'homme de refroidir la pensée, si chaude et corrompue par le
pouvoir.
Cette image est encore un hommage aux
femmes, amazoniennes, andines, des vallées, des draps, de l'univers.
Un hommage à la force créatrice, à l'humilité, à la sagesse, à
la tempérance.
Descendu des Pléiades et de la
constellation du Jaguar (Orion)
Tableau de l'artiste colombien Jeisson
Castillo
Zawa-Pinim
Création 2019
Cie Bardaf!
Cie Bardaf!
Lénaïc Eberlin - Conception et
récit
Philippe Rieger (Gaston) création sonore
Myriam Pellicane - Mise en scène
Léa Magnien et Quentin Chantrel (Collectif Lova Lova - Cayenne) - Costumes
Odile Kerckaert - Régie générale -Chargée de production
Marta Carrillo - Chargée de diffusion
Éric Navet - Consultant, Professeur émérite d’ethnologie à l’université de Strasbourg, chercheur auprès des amérindiens Teko, Guyane Française.
Philippe Rieger (Gaston) création sonore
Myriam Pellicane - Mise en scène
Léa Magnien et Quentin Chantrel (Collectif Lova Lova - Cayenne) - Costumes
Odile Kerckaert - Régie générale -Chargée de production
Marta Carrillo - Chargée de diffusion
Éric Navet - Consultant, Professeur émérite d’ethnologie à l’université de Strasbourg, chercheur auprès des amérindiens Teko, Guyane Française.
Brésil-Guyane, la frontière la plus
longue de France, à l’embouchure du fleuve Oyapock et de la
rivière Camopi, Lénaïc Eberlin rencontre les Teko et les Wayãpi,
peuples amérindiens et français. Accompagné par l’esprit des
légendaires guerriers Makan, il plonge au coeur de la mystérieuse
jungle amazonienne. Il explore ce monde inconnu, interdit mais bien
réel qui lui révèle une mythologie vibratoire, redoutable.
Fragments de rêves, visions fugitives, Lénaïc partage les rires et
la détresse des jeunes amérindiens.
Son récit témoigne de la richesse d'une mythologie cachée.
Amazonie en chantier, terre pillée, orpaillée, décharge à ciel ouvert, pirogues courants sur le fleuve, Lénaïc voltige autour de sa platine à manioc et recueille, entre sacs poubelles et boîtes de conserves, la survivance d’une oralité saisissante.
Un voyage dont il ne revient pas indemne.
Son récit témoigne de la richesse d'une mythologie cachée.
Amazonie en chantier, terre pillée, orpaillée, décharge à ciel ouvert, pirogues courants sur le fleuve, Lénaïc voltige autour de sa platine à manioc et recueille, entre sacs poubelles et boîtes de conserves, la survivance d’une oralité saisissante.
Un voyage dont il ne revient pas indemne.
un hommage à la résistance des
peuples amérindiens.
Les mythes de tradition orale dans les
sociétés tribales sont des repères lors des rites initiatiques,
ils intègrent la réalité, ils sont vivants, ils débusquent les
pièges, les peurs, interrogent la communauté.
Pour un conteur de Muttersholtz en
immersion dans les villages du fleuve auprès des familles sous le
carbet cuisine, c'est une prise de conscience hallucinante d'observer
à quel point les aventures de l'homme Jaguar témoignent encore
aujourd'hui d'une réalité et d'un art de vivre hors du commun.
A tous les niveaux, cette vie le met en
apprentissage.
Le mythe se révèle et lui transmet
l'indépendance et la fraternité pour le destin de tous les peuples.
Un regard attentif sur ces "oubliés
de la république".
Cette grande saga de l'homme Jaguar
nous invite à nous connecter à tout ce que nous avons mis de côté.
Emerge alors le rêve d'un changement
de cap, d'une écologie subtile, joyeuse et sacrée à réinventer.
Animaux, végétaux, minéraux,
humains, entretiennent avec leur environnement naturel et surnaturel
des relations extravagantes. Ils provoquent des tremblements, nous
plonge dans le noir, aiguisent nos sens, nous font découvrir un
ailleurs où il faut aller, nus et authentiques.
Depuis la colonisation, les fléaux
successifs ravagent les amérindiens de Guyane (Teko, Kalin'na,
Lokono, Wayapi, Wanaya, Paykweneh) : missions religieuses, épidémies,
orpaillages, commerçants, pollution des mines, pollution mentale,
politique, francisation, suicides, école inadaptée...
Dans le coeur des amérindiens, une
tristesse profonde cohabite avec le courage et la connaissance.
Depuis longtemps, dans les rêves des
jeunes "Makan"(Guerriers) de la forêt guyanaise, une voix
se fait entendre :
"un grand guerrier légendaire est
de retour parmi nous, il vient pour nous mettre en garde, nous
prévenir de grands dangers, il va falloir se battre, être fort,
pour sauver notre corps et aimer notre terre..."
Mythologie amazonienne: héritages et
transmissions
La création de l'homme Jaguar est le
fruit de voyages succéssifs en Guyane.
Entre immersions, collectages et
créations in-situ, Lénaïc Eberlin pose un point de vue d'artiste
conteur pour témoigner de la survivance des mythes amazoniens
aujourd'hui.
Une démarche d'apprenti auprès des
Amérindiens lui donne un autre éclairage sur ce que les
anthropologues ont consigné dans les livres. Ainsi, le mythe de
l'homme Jaguar se renouvelle avec l'actualité brûlante de ce peuple
légendaire en voix de disparition depuis la colonie française en
1604.
Il lui faut réactualiser le mythe pour
célébrer les rêves amazoniens.
Ainsi les familles Amérindiennes
rassemblées autour du cachiri pourront à nouveau en rire, et
de façon inattendue percevoir comment nos cultures se confondent et
activent des espaces de résonance et d'invention, qui témoignent de
notre désarroi face à nos conditions respectives.
1 - Les Noirs-Marrons de Guyane
En 2011, lors de son premier voyage en
Guyane sur le fleuve Maroni, Lénaïc Eberlin rencontre les
Bushinenges (les Noirs-Marrons), un peuple qui vit dans la forêt
amazonienne comme les Amérindiens.
"Parmi les Noirs-Marrons fuyant
l'esclavage au Surinam, les Bonis vont se distinguer des autres de
ces groupes en refusant un traité de paix avec les puissances
coloniales, les amenant à faire la guerre contre celles-ci puis à
s'établir dans l'actuelle Guyane Française. La résistance
africaine en Amérique fait partie de leur histoire et de leur
identité. Aujourd'hui elle souffre de la difficulté des
transmissions entre anciennes et nouvelles générations de cette
population de Guyane.
Outre la Guyane, le monde Noir ne peut
que gagner à apprendre et à réapprendre l'histoire de ce peuple
immensément authentique, courageux et admirable."
extraits des paroles de Sandro Capo
Chichi
2 - Les Teko de Guyane
En 2013, suite à la visite d’une
délégation Amérindienne Teko de Camopi dans le village natal de
Lénaïc Eberlin, Muttersholtz, un projet de jumelage se tisse entre
les deux communes.
Lenaïc Eberlin prends alors conscience
des problèmes majeurs dont sont victimes les peuples premiers de
Guyane.
2017, un nouveau voyage le long du
fleuve Oyapock pose les premiers jalons de ses aventures en
Guyane. Au contact des jeunes Teko, il prend la mesure de
l'intensité du mythe de l'homme Jaguar qui se retrouve en
morceaux authentiques, éparpillés dans telle danse, tel masque, tel
regard, telle façon de cuisiner.
Il se livre aux jeux de la rencontre,
des pistes s'ouvrent, autour de la platine à manioc où les Teko
cuisent les galettes, où s'échange une parole qui a du coeur, celle
qui réanime les héros légendaires, icônes de la dignité et de la
résistance Amérindienne.
Histoire et Actualité
La mémoire collective et la tradition
orale sont des repères agissants pour ces peuples confrontés à
l'orpaillage dévastateur, aux garimperos, à la pollution, aux
suicide des jeunes.
Les garimperos sont des chercheurs d'or
clandestins.
Il y a un millier de sites illégaux au
cœur de la forêt amazonienne.
Déforestation, destruction du sol avec
motopompes et concasseurs, utilisation du mercure pour s'agglomérer
avec l'or et former des pépites.
Tous ces travaux déversent boue et
mercure dans les criques et les cours d'eau et cette pollution
infeste les poissons et contamine les populations autochtones,
particulièrement les enfants.
S'ajoute aujourd'hui à tout ceci
l'orpaillage légal, apparaissent les projets de méga-mines sur les
terres sacrées des Amérindiens, la forêt est défigurée par les
bassins de rétention des boues infestées de cyanure et dont les
digues risqueraient de céder comme cela s'est passé au Brésil en
2015 sur les terres du peuple Krenak.
Les tribus amazoniennes depuis toujours
voient la colonisation comme une suite de « bracages »
dans une course au gain, ponctuée de pillages, de massacres, de mise
en esclavage de tout un peuple.
En Guyane, sur la trentaine de tribus
Amérindiennes recensées au début de la colonisation, aujourd'hui
il n'en reste que six.
Actuellement, les 6 premières nations
Amérindiennes de Guyane sont les Kali'na, les Teko, les Lokono, les
Paykweneh, les Wayana, les Wayapi. Ces premières nations se mêlent
aux autres populations : les métropolitains, les créoles, les
Bushinenges, les hmongs, les migrants (Brésil, Guyana, Surinam,
Haïti, Chine, Inde, Syrie, Liban, Afrique de l'Ouest, Pérou).
Le Pois(s)on d'or - photo Léa
Magnien -
Il faut se rappeler que les premiers
colons avec leur religion avaient pour mission d'aculturer, « de
tuer l'Amérindien et de garder l'homme »,de « transformer
l'animiste en bon sauvage évangélisé ». Aujourd'hui on parle
souvent d'eux comme de chômeurs qui perçoivent le R.S.A. Mais que
veut dire « chômage » pour un autochtone ?
Vaincus, sans jamais avoir perdu,
relégués au rang de minorité sur leur propre terre, la survivance
de leurs mythes représentent une puissance immaterielle qui continue
d'opérer spirituellement comme un rempart à tous les outrages.
Pour nombre d'Amérindiens et
Amérindiennes, ils et elles sont les petits enfants de grands
guerriers farouches qui ont combattu et résisté face à
l'envahisseur européen.
Lorsque les Amérindiens en parle à
Lénaïc Eberlin, celui ci entends déjà ces récits comme on écoute
un mythe ou une grande Saga familiale. Il s'étonne de la qualité de
ces histoires, du feu qui brille dans les yeux des grands-mères ou
de la grande tragédie qu'elles rapportent comme si c'était hier.
Il constate que ces chefs légendaires
en rebellion contre l'opresseur ont rejoint les héros irrévérencieux
que l'on retrouve dans leurs mythes fondateurs. Ainsi, les traditions
orales ont conservé un état de perception originel, où toutes les
valeurs sont intactes et transmises avec l'exigence d'une haute
considération.
Teko: comme beaucoup de noms des
différentes tribus de la planète, Teko veut dire tout simplement
"humains" ou "vrais hommes". Plus tard les colons
français leur donnent le nom d'Emerillons.
Les Teko sont un peuple constitué de
la tribu "Kouchili" et du clan des Singes Hurleurs, comme
ils vivaient dans les arbres, ils ont été plus résistants aux
maladies apportées par l'envahisseur européen contrairement à ceux
qui vivaient au sol.
"Avant que vous arriviez sur nos
terres, on vivait dans l'abondance, on avait pas besoin de
travailler, c'était la guerre permanente entre les différentes
tribus d'Amazonie mais nos peuples de guerriers avaient des valeurs."
C'est précisément cet esprit "Makan"
contenu dans les mythes qui fait qu'aujourd'hui les jeunes
Amérindiens peuvent retrouver la fierté d'être des Teko-Makan.
"Notre monde est fait de plusieurs
mondes et aucun n'est une marchandise. »
Leurs mythes leur transmet un discours
ferme, mâtiné de sagesse.
Il y a urgence à redonner des espaces
pour que ces mythes et ces pratiques se réactivent chez les
autochtones en recherche de référence et surtout d'action.
L'alcoolisme fait ses ravages, il y a
aussi la télévision, arrivée chez eux en 1998, ainsi les repères
se brouillent, de plus en plus d'extrêmes cohabitent et provoque le
chaos :
"pourquoi les blancs savent tout
et nous on ne sait rien?...
Avant je partais me coucher après avoir écouté les histoires de mon grand-père et de ma grand-mère. Maintenant c'est la télé qui me raconte des histoires.... » Arawak-Kali'na, village Taluen, Wayana
Avant je partais me coucher après avoir écouté les histoires de mon grand-père et de ma grand-mère. Maintenant c'est la télé qui me raconte des histoires.... » Arawak-Kali'na, village Taluen, Wayana
Dans le passé, face au fer de la
servitude, les Amérindiens ont souvent préféré la fuite ou la
mort.
Ils avaient la connaissance des plantes
et d'une certaine manière, leur honneur était sauvé et ils
entraient dans la légende. Aujourd'hui dans le silence et
l'indifférence sévit une terrible épidémie de suicides :
parents, adolescents, grands-parents se donnent la mort avec une
bouteille de désherbant ou une corde...
Pourtant, les mythes amazoniens nous
racontent que l'homme à la peau cuivrée n'a pas peur de la mort,
comme le Jaguar bondissant, la mort est un jeu. Le peuple d'Amazonie
possède le vrai courage.
Pourtant, sans le chaman et ses rituels
liés aux étapes de la vie et aux maladies, l'ombre d'un proche qui
s'est donné mort, voilà ce qui les fait trembler de peur.
« Même si cela a toujours
existé, depuis quelques années, les suicides dans les territoires
amérindiens ont beaucoup augmenté. Des associations, des médecins
ou des sociologues essaient de faire de la prévention, mais il y en
a toujours autant. Peut être notre problème résulte du fait
qu'il n'y a plus de grands chamanes à Camopi. Le dernier est mort
quand j'avais 7 ans. A cette époque, il y avait peu de suicides car
il nous protégeait des mauvais esprits.." Edward Jean-Baptiste,
Anôgog, Wayâpi/Teko
« La situation de témoin impose
des devoirs »
Au contact de la J.A.G. (la Jeunesse
Autochtone de Guyane) et quelques un(e)s de leurs porte-parole comme
Amandine Mawalum Nyx Galima (la dernière Ombre), il réalise que
malgré tout, les peuples premiers s'organisent, et que leur parole
et leurs actes ont l'éloquence et le talent de leurs ancêtres.
Il existe d'autres voix, celles qui
montrent le chemin de l'équité, vers une culture oubliée qui
pourrait nous aider à rêver et à construire un monde meilleur.
Le photographe Miquel Dewever-Plana
publie un livre bouleversant où il nous raconte le paradoxe des
amérindiens wayana, wayâpi et teko.
Qu'est ce qui fait que je suis moi? les traits de mon visage, les habits que je porte? ma posture? les traits de mes parents? mon regard? celui des autres?
à 7000 kilomètres de la métropole, sur des terres délaissées de Guyane qui accueillent les exploits de la conquête spatiale européenne et le projet désastreux de la mine d'or qui détruit la forêt, se joue dans un silence assourdissant un drame indigne d'un pays moderne.
Dans la forêt, les adolescents se donnent la mort et ils sont si nombreux que l'on peut parler sans exagération "d'une épidémie de suicide"
Qu'est ce qui fait que je suis moi? les traits de mon visage, les habits que je porte? ma posture? les traits de mes parents? mon regard? celui des autres?
à 7000 kilomètres de la métropole, sur des terres délaissées de Guyane qui accueillent les exploits de la conquête spatiale européenne et le projet désastreux de la mine d'or qui détruit la forêt, se joue dans un silence assourdissant un drame indigne d'un pays moderne.
Dans la forêt, les adolescents se donnent la mort et ils sont si nombreux que l'on peut parler sans exagération "d'une épidémie de suicide"
Ici, Arawak-Kali'na, village Taluen,
Wayana
"pourquoi les blancs savent tout et nous on ne sait rien?...
Avant je partais me coucher après avoir écouté les histoires de mon grand-père et de ma grand-mère. Maintenant c'est la télé qui me raconte des histoires....
Dans 2 ans je vais devoir quitté mon village pour aller en 6ième, ça me rend triste... en plus, on dit que ceux qui habitent dans les villes ne sont pas gentils avec les amérindiens...mais je n'ai pas le choix.."
"pourquoi les blancs savent tout et nous on ne sait rien?...
Avant je partais me coucher après avoir écouté les histoires de mon grand-père et de ma grand-mère. Maintenant c'est la télé qui me raconte des histoires....
Dans 2 ans je vais devoir quitté mon village pour aller en 6ième, ça me rend triste... en plus, on dit que ceux qui habitent dans les villes ne sont pas gentils avec les amérindiens...mais je n'ai pas le choix.."
Il faut lire le livre de Miquel
Dewever-Plana ... d'une rive à l'autre....Ici Tania Pinto
Tavares.... Wayâpi, commune de Camopi.. " J'ai eu mon premier
enfant à 17 ans et je viens d'accoucher du deuxième. Je ne veux pas
avoir plus de deux enfants parce que c'est trop fatiguant. J'ai
demandé à ma mère de me donner un remède pour ne plus en avoir.
Elle sait faire ça avec des plantes qu'elle cueille en forêt, mais
elle me dit que je suis trop jeune et qu'un jour je risque de le
regretter car le remède est définitif. Ici, contrairement à moi,
la plupart des gens souhaitent avoir beaucoup d'enfants. Entre le RSA
et la CAF on peut gagner beaucoup d'argent sans travailler. Et
beaucoup ne vivent que de ça. La situation des femmes n'a
malheureusement pas beaucoup évolué car elles souffrent toujours
autant de la brutalité des hommes. Tout au long de sa vie, ma pauvre
mère a subi la violence des coups. Elle était toujours tellement
couverte de bleus que les gens pensaient qu'elle peignait son corps
de génipa ( l'encre qui sert à tatouer) .. à l'époque où elle
vivait avec son premier époux, il n'y avait pas de suicides, mais si
c'était aujourd'hui ma mère me dit qu'elle se serait déjà pendue.
."
Photo et rapporteur : Miquel
Dewever-Plana .............. Edward Jean-Baptiste, Anôgog,
Wayâpi/Teko commune de Camopi. " Il était temps que je
revienne chez moi, retrouver ma forêt et mon fleuve. Pourtant j'ai
bien aimé mes trois années passées sur le littoral... mais je m'y
suis perdu. J'y suis allé pour faire un BEP que des profs ont choisi
pour moi et qui ne m'intéressait pas. Du coup je manquais beaucoup
l'école, et avec mes camarades j'ai commencé à fumer du cannabis
et à boire de l'alcool fort. Chaque fois un peu plus. Avec eux, j'ai
fait pas mal de bêtises. Quand je suis rentré au village, sans
diplôme, j'étais vraiment dans un sale état. Au bourg j'ai eu la
chance de faire une formation d'animation et de prévention
contre l'alcool, la drogue, mais aussi le suicide. J'avoue que cela
m'a permis de me sortir aussi de mes propres addictions. Je pense que
cette formation m'a sauvé. Maintenant je travaille avec une
association pour faire de la prévention dans mon village. Même
si cela a toujours existé, depuis quelques années, les suicides
dans les territoires amérindiens ont beaucoup augmenté. Des
associations, des médecins ou des sociologues essaient de faire de
la prévention, mais il y en a toujours autant. Peut être notre
problème résulte du fait qu'il n'y a plus de grands chamanes
à Camopi. Le dernier est mort quand j'avais 7 ans. A cette époque,
il y avait peu de suicides car il nous protégeait des mauvais
esprits.."
Amandine Mawalum Galima, le 18/06/2018
à Saint-Laurent du Maroni
< auditions finales débat public Montagne d’Or >
« Mesdames et messieurs,
je suis venue à vous en tant que porte parole du mouvement Jeunesse Autochtone de Guyane.
Voilà plus d'un an qu'avec mes sœurs et frères nous luttons pour mettre fin à cette absurdité qu'est le projet nommé « Montagne d'or ».
Nous avons tenté de faire valoir nos droits et notre parole, et au vu des tournures actuelles, nous avons réussi !
A plusieurs reprises, les autorités coutumières, qui sont les garants de nos communautés, se sont positionnées contre. Nous avons tenté d'expliquer nos craintes et nos réticences à la Montagne d'Or, qui dans le plus grand mépris a refusé le dialogue, en déshonorant un rdv à la demande des autorités coutumières. Cela car nous avons refusé la présence d'hommes armés : nous nous sommes engagés à assurer leur protection. Et malgré cela, ils ont rompu le dialogue. Pour nous, il est important qu'un dialogue, aussi compliqué qu'il soit, se fasse sans la présence d'arme.
Autour du site de la Montagne d'or existent 15 montagnes couronnées, des sites sacrés, des vestiges de nos ancêtres, de notre passé, de notre histoire. Comprenez que nous ne pouvons tolérer qu'un tel sacrilège soit fait sur notre territoire.
Pour le respect de notre passé et de notre avenir, nous promettons d'être toujours sur le chemin de la Montagne d'or. Nous sommes les héritiers d'un passé lourd, de blessures douleureuses, mais nous relevons la tête en ce jour !
Oui ! En ce jour les Peuples Premiers sont debout, nous relevons la tête aux cotés de toute la Guyane. Oui ! En ce jour nous souhaitons apporter un message d'espoir, nous ne sommes pas obligés de détruire, nous pouvons faire autrement, il suffit de le vouloir, il suffit d'oser !
En ce jour nous osons mettre au défi, à travers la Montagne d'Or, ce monde dirigé et animé par l'avidité de richesses et de pouvoir, ce monde déserté de respect et d'honneur.. Dans la lignée de nos ancêtres, nous nous battrons contre ceux qui traversent les océans pour ne mener que désespoir et destruction.
Mon message est rempli d'émotions et de sentiments car mon cœur est relié à cette terre, cette terre qui souffre des maladies que vous apportez. Les chants de mes ancêtres résonnent à travers nos âmes et le son des tambours nous murmure qu'il ne faut rien lâcher.
Oui, je n'évoque pas les chiffres, car le monde n'est pas composé de chiffres, mais de différentes formes de vie, qui dépendent les unes des autres. Il n'y a pas que ce vous voyez avec vos yeux, respectez le monde visible et invisible.
Je suis jeune, et je vous annonce que ce n'est pas de cet avenir que la jeunesse guyanaise a besoin. Il existe d'autres voix.
Je suis une femme, je porterai la vie en moi et je donnerai des enfants à cette terre, dans un monde où vous n'existez pas !
Je ne perdrai pas plus de temps avec vous, je m'en vais rejoindre la Guyane qui m'attend dehors, cette Guyane qui vous montre son opposition, je m'en vais rejoindre cette petite dizaine de personne qui disent en ce jour haut et fort NON A LA MONTAGNE D'OR !
Mesdames et messieurs, c'est bien que vous soyez de passage, vous nous avez fait comprendre ce que nous ne voulons pas !
Je vous souhaite de trouver le chemin du retour, sondez le fond de vôtre âme, cherchez-y une once d'humanité et guerrissez vos esprits.
Je m'appelle Mawalum, qui veut dire la dernière ombre, je suis l'esprit qui réside dans les racines des arbres et je vous mets au défi d'essayer de nuire à mon pays !
Merci. »
< auditions finales débat public Montagne d’Or >
« Mesdames et messieurs,
je suis venue à vous en tant que porte parole du mouvement Jeunesse Autochtone de Guyane.
Voilà plus d'un an qu'avec mes sœurs et frères nous luttons pour mettre fin à cette absurdité qu'est le projet nommé « Montagne d'or ».
Nous avons tenté de faire valoir nos droits et notre parole, et au vu des tournures actuelles, nous avons réussi !
A plusieurs reprises, les autorités coutumières, qui sont les garants de nos communautés, se sont positionnées contre. Nous avons tenté d'expliquer nos craintes et nos réticences à la Montagne d'Or, qui dans le plus grand mépris a refusé le dialogue, en déshonorant un rdv à la demande des autorités coutumières. Cela car nous avons refusé la présence d'hommes armés : nous nous sommes engagés à assurer leur protection. Et malgré cela, ils ont rompu le dialogue. Pour nous, il est important qu'un dialogue, aussi compliqué qu'il soit, se fasse sans la présence d'arme.
Autour du site de la Montagne d'or existent 15 montagnes couronnées, des sites sacrés, des vestiges de nos ancêtres, de notre passé, de notre histoire. Comprenez que nous ne pouvons tolérer qu'un tel sacrilège soit fait sur notre territoire.
Pour le respect de notre passé et de notre avenir, nous promettons d'être toujours sur le chemin de la Montagne d'or. Nous sommes les héritiers d'un passé lourd, de blessures douleureuses, mais nous relevons la tête en ce jour !
Oui ! En ce jour les Peuples Premiers sont debout, nous relevons la tête aux cotés de toute la Guyane. Oui ! En ce jour nous souhaitons apporter un message d'espoir, nous ne sommes pas obligés de détruire, nous pouvons faire autrement, il suffit de le vouloir, il suffit d'oser !
En ce jour nous osons mettre au défi, à travers la Montagne d'Or, ce monde dirigé et animé par l'avidité de richesses et de pouvoir, ce monde déserté de respect et d'honneur.. Dans la lignée de nos ancêtres, nous nous battrons contre ceux qui traversent les océans pour ne mener que désespoir et destruction.
Mon message est rempli d'émotions et de sentiments car mon cœur est relié à cette terre, cette terre qui souffre des maladies que vous apportez. Les chants de mes ancêtres résonnent à travers nos âmes et le son des tambours nous murmure qu'il ne faut rien lâcher.
Oui, je n'évoque pas les chiffres, car le monde n'est pas composé de chiffres, mais de différentes formes de vie, qui dépendent les unes des autres. Il n'y a pas que ce vous voyez avec vos yeux, respectez le monde visible et invisible.
Je suis jeune, et je vous annonce que ce n'est pas de cet avenir que la jeunesse guyanaise a besoin. Il existe d'autres voix.
Je suis une femme, je porterai la vie en moi et je donnerai des enfants à cette terre, dans un monde où vous n'existez pas !
Je ne perdrai pas plus de temps avec vous, je m'en vais rejoindre la Guyane qui m'attend dehors, cette Guyane qui vous montre son opposition, je m'en vais rejoindre cette petite dizaine de personne qui disent en ce jour haut et fort NON A LA MONTAGNE D'OR !
Mesdames et messieurs, c'est bien que vous soyez de passage, vous nous avez fait comprendre ce que nous ne voulons pas !
Je vous souhaite de trouver le chemin du retour, sondez le fond de vôtre âme, cherchez-y une once d'humanité et guerrissez vos esprits.
Je m'appelle Mawalum, qui veut dire la dernière ombre, je suis l'esprit qui réside dans les racines des arbres et je vous mets au défi d'essayer de nuire à mon pays !
Merci. »
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